Le Centre africain de contrôle et de prévention des maladies (Africa CDC) a averti que des millions de vies à travers le continent sont en danger en raison des coupes brutales dans l’aide au développement des États-Unis et de l’Europe, menaçant d’inverser des décennies de progrès en matière de santé mondiale.
Le Dr Jean Kaseya, directeur général de l’Africa CDC, a fait cette déclaration lors d’une conférence de presse virtuelle jeudi.
“Alors que le Congrès américain s’apprête à débattre de la réautorisation du Plan d’urgence du président pour la lutte contre le sida (PEPFAR) le 25 mars, des millions de vies en Afrique sont en jeu”, a-t-il déclaré.
Kaseya a tiré la sonnette d’alarme sur ce qu’il a qualifié de “catastrophe totale” pour le secteur de la santé du continent.
Il a souligné que 30% des dépenses de santé en Afrique proviennent de l’Aide publique au développement (APD). Or, cette année, le financement de l’APD a été réduit de 70%, passant de 81 milliards de dollars à seulement 25 milliards de dollars.
“Au-delà du VIH/SIDA, cette crise de financement survient alors que les épidémies de maladies infectieuses ont augmenté de 41% au cours des deux dernières années à travers l’Afrique”, a-t-il expliqué.
En République démocratique du Congo (RDC), la perte du financement de l’USAID a perturbé les tests du Mpox, entraînant une baisse de 16% des cas confirmés, non pas parce que l’épidémie est sous contrôle, mais en raison du manque de ressources pour la surveiller.
Il a également averti que ces coupes budgétaires risquent d’annuler 20 ans de progrès en matière de santé maternelle et infantile, de lutte contre les maladies infectieuses et de réduction de la pauvreté.
Selon les projections de l’Africa CDC, 39 millions de personnes risquent de sombrer dans l’extrême pauvreté à cause de ces réductions de financement.
Le financement de la santé demeure un défi majeur en Afrique. “Seuls deux pays africains, le Botswana et le Rwanda, respectent l’engagement de la Déclaration d’Abuja de consacrer 15% de leur PIB à la santé”, a déclaré Kaseya. De plus, seuls 16 pays disposent d’un plan de financement national de la santé, rendant leur système sanitaire extrêmement vulnérable sans financement extérieur.
Face à cette crise, les dirigeants africains explorent des alternatives. Kaseya a déclaré qu’il rencontrait des ministres et l’Union africaine pour plaider en faveur d’un investissement accru au niveau national et pour explorer des stratégies de financement mixtes impliquant le secteur privé.
Une proposition innovante consiste à mobiliser les 95 milliards de dollars de transferts de fonds annuels de la diaspora africaine, éventuellement via un modèle de taxation, pour financer les initiatives de santé.
Avec peu de temps pour agir, Kaseya a annoncé qu’il rencontrerait des membres de l’administration Trump, des responsables du PEPFAR et des législateurs américains pour défendre la poursuite de l’aide américaine.
Par ailleurs, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a signalé que la décision de l’administration Trump de suspendre l’aide étrangère pendant 90 jours a gravement perturbé l’approvisionnement en traitements contre le VIH dans huit pays : Haïti, Kenya, Lesotho, Soudan du Sud, Burkina Faso, Mali, Nigeria et Ukraine.
L’OMS a également averti que 80% des services de santé essentiels soutenus par l’organisation en Afghanistan pourraient fermer en raison du manque de financement. Déjà, 167 établissements de santé ont été fermés au 4 mars, et 220 autres risquent de fermer d’ici juin sans une intervention immédiate.
