Depuis plusieurs années, la région de Diffa est touchée par les inondations liées aux pluies diluviennes et à la crue de la Komadougou Yobé. Cette rivière charrie les eaux pluviales en provenance du Nigéria vers le Lac Tchad et coule aussi bien au Nigéria qu’au Niger. Elle couvre une superficie de 148 000km2 et suit une direction partant du Sud-ouest vers le nord-est. L’essentiel des écoulements de son bassin versant est généré par les eaux de pluies. Les eaux de ce cours d’eau constituent une ressource pour les riverains. Elles permettent en effet, l’irrigation des cultures de riz, des produits maraichers mais également la pêche. Malheureusement, depuis 2018 les producteurs riverains perdent l’essentiel de leurs productions suite aux dégâts provoqués par les inondations.
À la date du 23 octobre 2022, 15 404 personnes (2 452 ménages) réparties dans les quartiers Festival, Diffa Koura, et Charé dans la ville de Diffa et les villages de Bagara, Koulo Koura Gana, et Lada (commune de Diffa) ont été durement affectées par des inondations consécutives à la crue de la Komadougou. Des superficies importantes des champs de culture (sorgho, niébé, riz, choux, oignon etc.) sont submergées. Les populations de Lada (1 056 ménages de 5 783 personnes), un village entièrement englouti par les eaux, ont été particulièrement touchées. Toutes ces personnes sinistrées devraient être relocalisées sur le site de Boulangouri. La menace persiste malgré les travaux de protection des digues de sable réalisées.
Plusieurs autres communes ont été affectées, notamment les communes de Bosso, Toumour, Mainé-Soroa, Chétimari et Gueskérou. A cette même date, le nombre de personnes sinistrées dans toute la région s’élevait à 44 553 personnes (6 309 ménages). Source : OCHA
Afin d’évaluer les dégâts et les besoins des populations, l’organisation des Nations Unis pour l’agriculture et l’alimentation (FAO) à l’initiative de l’équipe sous régionale pour la résilience en Afrique de l’Ouest et au Sahel (REOWA) et en collaboration avec l’équipe Données en situation d’urgence (DIEM) a financé une évaluation rapide des besoins dans le secteur agricole et de la sécurité alimentaire.
Il faut noter que les inondations viennent aggraver une situation sécuritaire préoccupante dans la région qui remonte à 2015 avec l’avènement des attaques des groupes armés. Ces inondations, les pires depuis des années, sont survenues à un moment où le gouvernement prévoit de mettre en place un programme d’aide au retour des personnes déplacées dans leurs villages d’origine.
Avec le changement climatique, déjà en 2018, la région a connu des inondations dues à la crue de la Komadougou, ensuite à des fortes précipitations enregistrées pendant la saison hivernale. La qualité du sol (type sablonneux) aussi a joué un rôle dans l’aggravation des dégâts.
Le ministère de l’action humanitaire à travers la direction régionale de l’action humanitaire et de la gestion des catastrophes a recensé les dégâts causés.
L’an 2022 est la pire des ses trois dernières années, occasionnant des dégâts importants dans les six (6) communes riveraines de la région notamment la commune de Mainé, Chétimari, Diffa, Gueskerou, Toumour et Bosso sur les secteurs socioéconomiques de la région à travers l’occupation des espaces agricoles par les eaux surtout les périmètres irrigués sur lesquels toute la région fonde espoir. Cette population du Manga est dans un risque élevée d’une situation alarmante de vulnérabilité aiguë que cette région se trouvera si des dispositions d’accompagnement de ses communautés ne sont pas prises à temps.
Abdoulaye moussa est riziculteur sur le périmètre irrigué de Taiwan (Diffa). Il explique en détails comment cette inondation a mis sa famille en vulnérabilité totale. « Je suis vulcanisateur de profession, mais la culture du riz est mon activité qui me permet de nourrir ma famille et subvenir aux autres besoins familiales, malheureusement ces inondations ont tout emporté. A l’heure où je vous parle, j’ai été obligé de reporter le mariage de ma fille parce que je ne puis lui prodiguer le minimum qu’une jeune mariée aura besoin comme ustensiles, couches et autres. Depuis cette inondation, ma famille mange rarement deux (2) fois par jour ».
Ils sont environ 20 000 producteurs de tous les secteurs confondus qui vivent aujourd’hui la situation d’Abdoulaye Moussa et dont les appuis de l’état ne sont jamais parvenus.
Le tableau ci-dessous est un échantillon de personnes impactés et les pertes subites par les communautés dans 3 communes de la région.
TABLEAU RECAPITULATIF DES DEGATS ET VALEURES ESTIMATIVES
| NO | Périmètres touchés par commune | Champs inondés en ha | Total champs inondés en ha | Nombres des producteurs | Nombres des personnes touchées | ||
| Riz | Poivron | Oignon | |||||
| 1 | Chetimari | 350 | 390 | 300 | 1 040 | 4 160 | 29 120 |
| 2 | Diffa | 750 | 120 | 100 | 970 | 3 880 | 27 160 |
| 3 | Gueskerou | 150 | 1 500 | 200 | 1 850 | 7 400 | 51 800 |
| Total | 1 250 | 2 100 | 600 | 3 860 | 15 440 | 108 080 | |
| Valeurs estimatives | 3 500 000 000 | 17 472 000 000 | 6 975 000 000 | 27 947 000 000 | |||
A la lumière de ce tableau c’est environ vingt-huit (28) milliards que les paysans perdent pendant aujourd’hui 4 années consécutives.
Selon la direction régionale de l’hydraulique de Diffa, l’absence de communication avec les autorités nigérianes d’où la Komadougou yobé prend sa source, le manque de ressources pour la réhabilitation de la digue de Lada, et surtout le retard dans la construction de cette digue de Diffa sur fonds de la Banque mondiale sont entre autres les facteurs ayant aggravé les inondations de la Komadougou Yobé. Mais actuellement l’interdiction stricte de construire sur des terrains inondables et la démolition d’une partie du quartier Onaha de Diffa donnent espoir que la région de Diffa peut être protégée contre les inondations.